La violence, sous ses diverses formes, suscite de multiples images et mises en discours aujourd’hui en Amérique latine. Il est apparu aux auteurs de cet ouvrage que l’exploration des divers sens que revêt ce terme de même que l’examen des liens entre les représentations que les acteurs s’en font et les luttes économiques, politiques et symboliques dans lesquelles ils s’engagent ouvraient des pistes nouvelles et prometteuses pour la compréhension des sociétés latino-américaines contemporaines. Nous sommes partis du constat que les rapports historiques entre classes et groupes ethniques ont inscrit la violence au cœur même des rapports sociaux en Amérique latine, que ce soit sous la forme d’autoritarisme politique, de luttes pour la terre, de mouvements de guérillas, de violence criminelle qui s’accroît dans les grandes villes au point de sembler indépendante de notre volonté, ou encore sous la forme de l’exclusion brutale de millions de travailleurs par suite de l’application des mesures d’austérité imposées par les grands créanciers internationaux. Les textes réunis dans le présent ouvrage examinent comment les expériences personnelles et collectives de cette violence interagissent avec les imaginaires qui s’entrecroisent dans l’espace public. Ces images, qui émergent tant dans les croyances populaires que dans les discours des politiciens, tant dans les journaux à sensation qui étalent la violence délinquante que dans les mouvements sociaux luttant pour faire la lumière sur des violences occultées, contribuent à créer chez les habitants des villes et des campagnes, chez les membres des classes moyennes ou des groupes paupérisés, des imaginaires de la violence qui vont influencer leurs gestes privés, comme la recherche de mesures de protection personnelle et familiale, tout comme leurs actions politiques.