Buffy Sainte-Marie, Mary Ellen Turpel-Lafond, Michelle Latimer ou Joseph Boyden… autant de personnalités publiques qui ont dû récemment faire face à la vindicte populaire, toutes jugées coupables du même crime, celui d’avoir revendiqué une identité autochtone, sinon fictive, à tout le moins mal documentée et souvent non reconnue par les Premiers Peuples concernés. L’auto-autochtonisation serait devenue la nouvelle peste au pays, entrainant à sa suite une chasse aux « faux Métis », race shifters et autres pretendians afin d’éviter toute contagion. Or, le phénomène d’auto-autochtonisation et les dénonciations qu’il suscite participent du même processus, d’une même logique mimétique, du même fléau. Ce sont des symptômes d’un mal plus profond, d’un régime sacrificiel qui constitue la pierre de faîte de l’édifice colonial canadien. Telle est la thèse au cœur de cet essai. L’argument s’appuie sur près de 25 ans d’expérience en études métisses et sur un cadre théorique peu utilisé en études autochtones et postcoloniales, la théorie mimétique de René Girard (1923-2015). Le livre explore ainsi les rivalités pour le désir de reconnaissance que se livrent les populations métisses, mais également comment ces antagonismes « internes » s’inscrivent dans un système de rivalités plus global, lequel implique non seulement les populations autochtones, mais également l’ensemble de la société canadienne.